Alors que le 2 octobre les Colombiens étaient appelés aux urnes pour ratifier l’accord de paix entre le gouvernement et les Forces armées révolutionnaires de Colombie – Armée du peuple (FARC-EP) ouvrant la voie à l’achèvement d’un conflit de plus de 50 ans et à la « construction d’une paix stable et durable », la victoire du « non », tel un coup de massue, engendrait une crise politique et annonçait des chemins plus longs…
Les raisons de ce rejet sont multiples et nécessitent de revenir sur des points tels que la forte abstention (63%), la désaffection « politique » d’une population encore dominée par la peur, la campagne agressive des défenseurs du « non », Uribe à leur tête, la peur des FARC et leur constante diabolisation à travers les médias. Ainsi, pour comprendre ce désaveu de l’opinion publique colombienne, il semblerait important de s’attarder sur le rôle des médias en Colombie, et de leur responsabilité dans la perception du conflit. Quand celui-ci n’a pas simplement été nié, il a été le plus souvent renvoyé à la seule action des guérillas « terroristes », omettant les violences et la responsabilité de l’Etat et des paramilitaires, ces derniers souvent absents du langage médiatique. De plus, sous le gouvernement d’Uribe (2002-2010), une rhétorique belliqueuse s’est installée, permettant de révoquer toutes les causes sociales et politiques du conflit.
Il semblerait donc que, parallèlement au combat qui se déroule dans les territoires colombiens, un autre champ de bataille, plus virtuel cette fois, est celui des médias. Alors que l’indépendance et la liberté de la presse sont aujourd’hui des enjeux majeurs à travers le monde, qu’en Colombie la presse réussisse à représenter la réalité politique et sociale, à redonner une voix aux victimes oubliées, semblent des points cruciaux dans une perspective de construction de la paix. Et il paraitrait que les FARC aient bien compris que leur image en dépendait. Alors qu’en déposant les armes, ils sortent de la clandestinité, c’est aussi une autre image qu’ils cherchent à communiquer, et se dévoilent peu à peu loin des caricatures guerrières.
Mercredi 7 décembre à 19 h 30 au Lieu-dit, 6, rue Sorbier 75020 Paris (M° Ménilmontant ou Gambetta)
Seront présents avec nous pour en discuter :
- Maurice Lemoine : Journaliste, spécialiste de l’Amérique latine. Il s’est rendu en Colombie pour la première fois en 1973. Depuis, il y retourne régulièrement pour suivre et analyser le conflit.
- Yezid Arteta : Ancien commandant des FARC, aujourd’hui enseignant de l’Ecole de Culture et Paix de l’Université Autonome de Barcelone et chroniqueur pour « El espectador ».
Initiative de la Coordination populaire colombienne à Paris en partenariat avec Mémoire des Luttes.