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Coup d’Etat au Honduras

Dossier spécial de Mémoire des luttes

mardi 30 juin 2009   |   Bernard Cassen, Christophe Ventura
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Un coup d’Etat a eu lieu dimanche 28 juin au Honduras (7,5 millions d’habitants) contre le président démocratiquement élu, Manuel Zelaya. L’armée, alliée aux forces de la droite et de l’oligarchie qui contrôlent le Congrès et la Cour suprême, l’a appréhendé brutalement à son domicile, l’a enlevé, puis transporté par avion au Costa Rica.

Dans le même temps, le Congrès a avalisé ce coup de force et désigné son président, Roberto Micheletti, nouveau chef de l’Etat "de fait". A cette fin, il s’est notamment appuyé sur une prétendue lettre de démission de Manuel Zelaya. Celui-ci a indiqué, depuis le Costa Rica, qu’il s’agissait d’un faux et qu’il ne s’était nullement démis de ses fonctions. Les principaux médias, complices des putschistes, ont dissimulé cette information majeure. On croit revivre le scénario du coup d’Etat avorté du 11 avril 2002 contre le président Hugo Chavez au Venezuela.

Le Costa Rica, ainsi que tous les autres gouvernements d’Amérique latine et des Caraïbes, les Etats-Unis, l’Union européenne et nombre de ses gouvernements (dont celui de la France), l’Organisation des Etats américains (OEA) , les Nations unies, par la voix de Miguel d’Escoto, président en exercice de l’Assemblée générale, ont condamné le coup.

Tout indique cependant que les putschistes ne comptent pas désarmer, et la répression contre les partisans du respect de l’ordre constitutionnel se développe. Des diplomates cubains, nicaraguayens et vénézuéliens ont été arrêtés puis relâchés en rase campagne. Des radios et des télévisons ont été attaquées par l’armée. Des rumeurs d’arrestations de dirigeants syndicaux et politiques circulent. On est sans nouvelles de la ministre des affaires étrangères, Patricia Rodas.

Manuel Zelaya (élu en 2005 et en fonction depuis 2006), à qui l’oligarchie ne pardonnait pas les mesures progressistes et sociales qu’il avait prises (par exemple, la mise en place d’un salaire minimum), et encore moins l’adhésion du Honduras à l’Alternative bolivarienne pour les peuples de notre Amérique (Alba) menait une bataille politique majeure pour ouvrir la voie à l’organisation d’un processus constituant. Comme cela avait été le cas au Venezuela, en Bolivie et en Equateur, il avait rapidement pris conscience que le cadre constitutionnel en vigueur au Honduras interdisait toute transformation sociale en profondeur, et qu’il convenait donc d’en élaborer démocratiquement un autre. La droite, le patronat, la hiérarchie de l’Eglise catholique, les Eglises évangéliques et l’armée n’en voulaient à aucun prix. 

Le 28 juin, les Honduriens étaient appelés à se prononcer, par la voie d’une consultation populaire sans force contraignante - une sorte de sondage grandeur nature -, sur la proposition du président de convoquer, après les élections prévues le 29 novembre 2009, une Assemblée nationale constituante. Dans le cas où cette consultation aurait recueilli une majorité de "oui", le président aurait soumis un décret à l’approbation du Congrès pour que, le 29 novembre, les Honduriens se prononcent formellement sur la convocation d’une Constituante. Ils l’auraient fait dans une "quatrième urne", les trois premières étant réservées respectivement à l’élection du président, des députés et des maires.

Contrairement à ce qu’avancent la plupart des commentateurs internationaux, il ne s’agissait pas, pour Manuel Zelaya, d’obtenir la possibilité de se représenter à la présidence lors de ces mêmes élections. Il ne l’aurait pas pu puisque ces élections se dérouleront dans le cadre de la Constitution actuelle qui ne permet pas la réélection du président sortant à la tête de l’Etat.

Sur place, la mobilisation populaire s’organise. Syndicats et mouvements sociaux (notamment La Via Campesina) manifestent pour exiger le retour du président Manuel Zelaya et celui de l’ordre constitutionnel. La solidarité internationale se développe également alors que le président hondurien interviendra mardi 30 juin devant l’Assemblée générale des Nations Unies.

Mémoire des luttes propose diverses contributions et analyses en français, espagnol et anglais sur ce coup d’Etat au Honduras.





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