Actualités

Face à l’offensive politico-médiatique contre le MST

L’exigence d’une véritable réforme agraire au brésil

vendredi 30 octobre 2009
Lecture .

Il y a quelques semaines, les grands réseaux de télévision brésiliens ont diffusé en boucle, et cela jusqu’à la nausée, des images d’une occupation de terres de la Sucocítrico Cutrale (Etat de Sao Paulo) menée par des militants du Mouvement des travailleurs ruraux sans terre (MST). Ces grands médias ont fustigé l´arrachage de quelques pieds d’orangers, qualifié d’“acte de vandalisme”.

Ils ont cependant omis une information essentielle : la propriété de ces terres est contestée par l’Institut national de la réforme agraire (INCRA) et par la justice brésilienne. Cet espace immense, appelé Núcleo Monzones, s’étend sur près de 30 000 hectares. Sur ce total, 10 000 hectares appartiennent au domaine public et sont officiellement considérés comme à l’abandon ; 15 000 autres sont improductifs. En outre, il n’existe aucune preuve que la destruction présumée des pieds d´oranger soit imputable aux « sans terre ».

Pour les secteurs dominants, l’image de pieds d´orangers arrachés lors d’une action de protestation est bien plus choquante que celle de familles vivant dans des campements pauvres, et empêchées de produire de quoi se nourrir. En fait, cette campagne médiatique a un double objectif : d’une part, empêcher la révision des indicateurs de productivité agricole, encore aujourd’hui fondés sur des statistiques des revenus agricoles datant de 1975 ; et, d’autre part, appuyer la création d’une commission d’enquête parlementaire sur le MST.

De cette manière, le débat sur la question agraire est mis sur une voie de garage. On ne parle plus des responsables des inégalités et de la concentration des terres, mais on criminalise ceux qui luttent pour les droits du peuple. La révision des indicateurs de productivité montrerait que, malgré tous les progrès techniques, une grande partie des latifundios restent improductifs, contrairement à ce que prétendent leurs propriétaires afin d’éviter une réforme agraire.

Les classes dominantes brésiliennes déploient un vaste arsenal politico-médiatique en vue de criminaliser le principal mouvement social du pays qu’est le MST, et d’affaiblir ses bases de soutien. Les géants de l´agro-industrie veulent bloquer toute réforme agraire afin d’ imposer un nouveau modèle agro-exportateur, extrêmement prédateur en termes sociaux et environnementaux.

La concentration des terres au Brésil ne fait qu’augmenter depuis 10 ans. Selon l’Institut brésilien de géographie et de statistique (IBGE) les exploitations de plus de 1 000 hectares occupent plus de 43 % de l’espace total, alors que celles de moins de 10 hectares n’en représentent que 2,7 %. Selon la Commission pastorale de la terre, les conflits agraires du premier semestre 2009 ont été d’une extrême violence. De janvier à juin, on en a dénombré 366, affectant directement 193 174 personnes, avec un assassinat pour 30 conflits en moyenne. En 6 mois, on a ainsi compté 12 assassinats, 44 tentatives d’homicide, 22 menaces de mort et 6 cas de torture.

La stratégie de lutte du MST, elle, s’est toujours caractérisée par la non-violence, y compris face à l’extrême agressivité des agents de l’Etat et des milices et des hommes de main au service des grandes entreprises et des latifundios. Les occupations de terres ont pour objectif de faire pression sur les gouvernements afin qu’ils mettent en oeuvre la réforme agraire.

Le Brésil, comme le reste du monde, a besoin d’une agriculture socialement juste, écologique, capable d’assurer la souveraineté alimentaire et fondée sur la libre coopération entre petits agriculteurs. Pour cela, il faut des mouvements sociaux puissants, appuyés par la majorité de la population.

C’est pourquoi Mémoire des luttes condamne la criminalisation du MST et des autres luttes sociales au Brésil et appelle l’opinion internationale à leur manifester sa solidarité.

Ce texte a été élaboré à partir d’une contribution placée sur le site des amis de Vive TV : http://www.larevolucionvive.org.ve/spip.php?article519&lang=es





A lire également